Les CEF

(Closed End Fond = Fonds fermés)

Les Closed End Funds (CEF) ou fonds d’investissement fermés (ou fonds à capital fixe) en Français sont assez peu connus des investisseurs français alors qu’ils le sont beaucoup plus des investisseurs outre atlantique.

Tout comme un fond d’investissement ouvert (OPCVM), vous confiez la gestion de votre investissement à une société de gestion qui se chargera de sélectionner les produits (actions, obligations …), et essaiera de trouver le bon moment pour les arbitrages (achats, ventes, renforcement, allègement …). On parle donc d’une gestion active (comme pour les OPCVM), et non d’une gestion passive (cas des ETF).

La principale différence vient du côté « fermé » (Closed) du fond ! Contrairement aux fonds ouverts, dont le nombre de parts fluctue en fonction des sorties et entrées de capitaux sur le marché, celle d’un CEF est fixe. Le montant du capital prescrit est souscrit en une seule fois par les investisseurs à concurrence du nombre d’actions correspondant. Les seules variations de capital ultérieures résulteront des dividendes distribués et des plus-values (ou moins-values) dégagées.

NB : en France, les CEF prennent la forme de société d'investissement à capital fixe (SICAF). Leurs actions sont négociables sur un marché́ secondaire, réglementé ou de « gré à gré ». Juridiquement, les SICAF sont intégrées dans la famille des OPC (organismes de placement collectif) aux côtés des OPCVM. Elles ne peuvent faire d’offres au public que si la valeur nominale de leurs actions dépasse 10 000 €.


Qu’apporte le coté fermé du fond ?


Le fait que le capital soit fixe et connu dès le départ, est un avantage dans la mesure où le gestionnaire peut gérer le portefeuille en s’affranchissant des contraintes de liquidités (destinées à honorer les demandes de rachats dans le cas d’un fonds « ouvert »).

Le nombre de titres restant fixe, la seule façon d'acquérir des parts d'un Closed-End Fund est d'attendre qu'un ancien détenteur les cède sur le marché secondaire. Le prix des parts est déterminé par le marché. Une décote entre le cours de bourse et la valeur de l’actif net est possible.

En effet, imaginez un fonds ouvert (FCP/OPCCM) connaissant un certain succès depuis quelque temps, qui plus est dans un marché haussier, voir en haut de cycle. Ce fonds va attirer les investisseurs qui vont acheter des parts supplémentaires. Le gestionnaire va donc devoir trouver de nouveaux investissements pour ces nouvelles liquidités. Le fait que le marché soit en haut de cycle va obliger le gestionnaire à acheter des produits (actions, obligations …) plutôt chères par rapport à leur valeur intrinsèque, et donc pas avec le meilleur des timings et/ou qu’il n’aurait pas forcément achetés s’il n’avait pas dû investir ces nouvelles liquidités !

Inversement en période de crise, ou de marché baissier, les investisseurs vendent leurs parts et le gestionnaire est obligé de vendre une partie de ses investissements alors qu’il faudrait au contraire peut-être en profiter pour acheter à bon prix des actions de qualité à un prix plus raisonnable que d’habitude !

Ces 2 exemples/situations n’impacteront pas le gestionnaire du fond fermé (CEF) qui n’aura pas à s’en soucier grace à ce capital et au nombre de parts fixes.


Quelles sont les caractéristiques et spécificités des CEF ?

Quotation intraday, NAV et discount/premium

Comme nous l’avons dit précédemment, le prix d’un CEF est déterminé par la marché, en fonction de l’offre et de la demande. Contrairement à un fonds ouvert (OPCVM) qui ne cote souvent au mieux qu’une fois par jour, le prix d’un CEF évolue tout au long de la journée de cotation, exactement comme une action ou un ETF. D’ailleurs un CEF s’achète exactement comme une action ou un ETF, et en général avec la même tarification.

Chaque CEF publie régulièrement (en général tous les jours) sa NAV (Net Asset Value) qui correspond à la valeur des actifs (actions, obligations …) que possèdent du fonds.

Comme le prix du CEF est lui fixé par le marché en fonction de l’offre et de la demande, il peut y avoir un décalage entre le prix du CEF et sa NAV. Si le prix de l’action du CEF est supérieur à sa NAV on parle de premium par rapport à la NAV, si le prix du CEF est inférieur à la NAV on parle de discount.

On pourrait donc penser que l’on fait systématiquement une bonne affaire en achetant un CEF en discount, donc moins chère que « ce qu’il vaut ». En fait ce n’est pas toujours vrai, car certains fonds cotent systématiquement avec une décote, et d’autres avec un premium. Le prix du marché d’un fonds peut par exemple augmenter parce qu’il est axé sur un secteur qui est actuellement populaire auprès des investisseurs, ou parce que son gestionnaire est bien considéré par les investisseurs. Ou encore, un historique de sous-performance ou de volatilité peut rendre les investisseurs méfiants à l’égard du fonds, ce qui fait baisser la valeur de son action.

Il est donc intéressant de regarder l’historique de premium/discount d’un fond (information facilement trouvable sur les sites spécialisés listés ci-dessous) afin d’essayer de se positionner lorsque le prémium est inférieur ou le discount plus important que la tendance moyenne.

Ci-dessous un exemple d'évolution premium/discount avec le CEF ETO :

Levier

Les CEF utilisent souvent l’effet de levier, c’est-à-dire qu’ils empruntent de l’argent pour financer leurs achats d’actifs et/ou pour augmenter les rendements.

Cette stratégie est une arme à double tranchants : elle améliore les rendements lorsque les investissements augmentent, mais amplifie les pertes lorsque les actions chutent.

Ce levier va aussi induire une plus grande volatilité dans le prix de l’action du CEF.

Ce taux de levier (leverage en anglais), ou endettement, est communiqué en permanence par le CEF, et est trouvable sur le site du CEF ou sur les sites spécialisés listés ci-dessous.

En fonction de votre aversion au risque, vous pourrez choisir un CEF avec un levier faible, voire nulle (donc à priori moins risqué) ou plus important.



Distribution et dividendes

Nous venons de voir que les CEF utilisent fréquemment du levier pour augmenter le rendement du dividende, car le dividende est effectivement une composante importante des CEF.

En effet, les CEF sont de gros pourvoyeurs de dividendes, qu’ils versent souvent mensuellement ou au pire d’une manière trimestrielle. Ces dividendes sont souvent élevés, et il n’est pas rare d’observer des dividendes compris entre 6 et 10% (la moyenne se situe entre 7 et 8%).

Ci-dessous un exemple de régularité et d'évolution du dividende toujours avec e fonds ETO :

A noter que ces distributions peuvent se faire sous 2 formes (parfois utilisées conjointement) :

  • un revenu généré par le fonds (revenu d’intérêts, dividendes ou gains en capital)

  • ou un remboursement de capital appelé ROC (ce remboursement du capital réduisant la taille des actifs du fonds)

Ci-dessous, exemple de listing des distributions sur un an pour le fonds ETO, où l'on constate parfois l'apparition d'une part de ROC dans la distribution :

Attention à ne pas uniquement vous focaliser sur les gros rendements, car il ne faut pas oublier que ces versements détruisent de la valeur en s’accompagnent d’une chute du prix du CEF et/ou de sa NAV.

En effet, si vous recevez un rendement de 10% annuel, mais que le prix du CEF et de de la NAV chute de 10% tous les ans sans jamais remonter, votre bilan est nul et vous ne gagnez rien ! Il faut que la NAV et indirectement le prix du CEF qui doit suivre la NAV, soient globalement stables ou croissants sur plusieurs années !

Ci-dessous exemple d'évolution de prix du CEF et de sa NAV :


Secteurs et diversification :


Comme pour les OPCVM, lorsque vous achetez une part de CEF, vous achetez indirectement un fragment de l’ensemble d’actions/obligations qui constitue le portefeuille du CEF. Vous obtenez donc naturellement une diversification significative.

Bien qu’il existe plus de 500 CEF couvrant de nombreux domaines/secteurs, les CEFs ne couvrent pas tous les secteurs d’activités et encore moins d’indices, contrairement aux OPCVM ou aux ETFs,

  • Le domaine le plus représenté concerne les fonds d’obligations municipales (Municipal Bond en anglais) qui représentent 32% des CEF. Ces fonds investissent dans les titres de créance des gouvernements étatiques et locaux, et des agences du gouvernement fédéral. Les gestionnaires de ces fonds recherchent souvent une large diversification pour minimiser les risques, mais peuvent également compter sur l’effet de levier pour maximiser les rendements.

  • La 2e catégorie (30% des CEF) est constituée des fonds actions américaines (U.S. Equity Funds). Ces fonds ont des portefeuilles composés d’actions d’un large éventail de sociétés diversifiées dans de nombreux secteurs et régions géographiques. Certains fonds d’actions diversifiées se spécialisent dans une catégorie d’actif ou un style de placement particulier, comme les grandes capitalisations, les petites capitalisations, les fonds de croissance (growth) ou de type Value.

Ci-dessous exemple de diversification du fonds ETO et Top10 de ses positions :

NB : cette catégorie "U.S. Equity Funds" comprend une sous-catégorie « Sector and Speciality Fund » : Ces CEF se concentrent sur les actions d’un secteur donné telles que les banques, les médias, les ressources naturelles ou les soins de santé, ou sur des titres spécialisés tels que les actions préférentielles (preferred) ou les titres convertibles. Ils peuvent être un moyen de participer à la fortune d’un secteur économique, d’un groupe industriel, ... tout en réduisant les risques en investissant dans de nombreuses entreprises différentes.

  • La 3e catégorie (20% des CEFs) est constituée des fonds obligations US (Taxable U.S. Bond). Ces CEF sont axés sur des instruments de grande qualité, notamment les bons du Trésor US, les organismes gouvernementaux et les obligations de sociétés de première qualité, qui génèrent tous un revenu d’intérêts imposable par le gouvernement fédéral US. D’autres peuvent également intégrer des « obligations à rendement élevé » de qualité inférieure dans leurs portefeuilles, ou même mettre l’accent sur les obligations à rendement élevé pour leurs taux de rendement attrayants (à des niveaux de risque un peu plus élevés).

  • Viennent ensuite les fonds internationaux actions (Global and International Funds) qui représentent 11%des CEF, et les fonds internationaux obligataires.

Frais des CEF

Comme les fonds sont activement managés par le gestionnaire, tout comme pour les OPCVM, les frais sont relativement importants évoluant de 0,8% à près de 3%. Comme pour les fonds ouverts, plus les frais seront faibles et mieux ce sera pour vous.

A noter que contrairement aux OPCVM, il n’y a pas de frais d’achat autres que les frais traditionnels de votre courtier, car un CEF cote comme une action classique ou un ETF. Les frais sont donc liés aux frais de mangement et aux frais de levier, qui, selon le fonds peuvent être significatifs si le fonds utilise un levier important. Ces frais sont retirés/inclus dans le prix de cotation, vous n’aurez pas à les payer en sus !

A noter également que lorsque les CEF expriment leurs performances, ils le font net de frais (puisqu’ils sont nativement inclus). De plus, les performances sont significativement meilleurs pour les bons CEF que pour les OPCVM, en partie grâce au levier qui booste le rendement (mais peut aussi entrainer plus de pertes quand le marcher est baissier).




Où acheter des CEF?


Les CEF ne sont achetables que chez les « bons » courtiers/brokers internet, vous n’en trouverez pas chez votre banque traditionnelle ou en ligne.

Vous les trouverez par exemple tous chez Interactive Broker, et avec quelques restrictions chez Degiro. Ce sera en revanche plus compliqué chez Saxo … et autres courtiers européens qui les « confondent » parfois avec des ETF et veulent donc avoir un DICI en Français pour pouvoir les vendre.

Chez Interactive ou Degiro, les frais sont identiques à ceux d’une action traditionnelle ou d’un ETF.



Comparatif CEF / OPCVM / ETF


Comme nous venons de le voir, les CEF présentent des points communs mais aussi des différences avec les fonds traditionnels (OPCVM) et les ETF.

Le tableau ci-dessous vous permettra de les comparer :

Comment choisir un CEF ?


Pour bien sélectionner vos CEF, il va falloir revoir tout ce que nous avons vu précédemment. Voici une synthèse des éléments à étudier à minima :

  1. Choisir les secteurs qui vous intéressent (bond, immobilier, santé, utilities, US, technologies) et essayer de diversifier (penser à checker la composition de chaque CEF, car certains ont des positions très proches)

  2. Evaluer la performance du fond sur le long terme, et notamment le fait que sa NAV ne suive pas une tendance décroissante.

  3. Checker le premium/discount sur la NAV, et chercher à investir quand le discount est plus important ou le premium plus faible que pour la moyenne des dernières années.

  4. Checker le dividende et s’assurer qu'il est bien couvert par le NII, et le type de distribution (présence de ROC ou non -> à éviter)

  5. Quel niveau de levier est utilisé (plus il est élevé, et plus le fonds amplifiera la performance de son secteur, et plus les risques sont importants : essayer de sélectionner un fonds avec un levier < 40%) ?

  6. Quels sont les frais ? (plus ils sont faibles et meilleur c’est pour vous)

  7. Privilégier certaines maisons de gestion :

  • PIMCO pour les fonds obligataires

  • Cohen & Steers pour l’immobilier, utilities, preferred

  • Tekla pour la santé

  • Eaton, Liberty, Nuveen pour les actions US, le Nasdaq

Voici une petite sélection complètement non exhaustive !

  • Obligations : PTY, PCI, PDO

  • Immobilier : RFI, RQI, RNP

  • Santé : THQ, HQH

  • Utilities : UTF, UTG

  • US diversifié : ETO, EVT, USA, ASG

  • Internationnal : CGO

  • Small Caps : RVT

  • Techno (Nasdaq) : QQQX

  • Preferred : RNP, PSF, DFP, PFO


Veillez à faire vos propres investigations afin de bien comprendre les CEF que vous allez sélectionner en allant sur le site de chaque fonds et/ou via les sites indiqués ci-dessous !


Sites web sur les CEF :


Il y a 2 sites qui font référence dans le milieu des CEF :

  • https://www.cefconnect.com/ : C’est la bible ! Vous y trouverez l’actualité sur les CEF, un screener de CEF, un outil de portfolio CEF personnalisable, un centre d’éducation sur les CEF, et bien évidemment une fiche pour chaque CEF avec notamment : présentation du fonds, historique de NAV et prix, frais, dividendes, performance, composition ….)

  • https://www.cefa.com/ : C’est la 2e référence. Le site semble plus complet mais du coup un poil plus difficile à appréhender, avec beaucoup d’actualité et d’analyses, un screener, des formations, une fiche par CEF …

Sur comprendrelabourse.fr nous aimons aussi beaucoup un 3e site qui n’est pas spécifique au CEF, car il traite aussi des fonds classiques et des BDC. Il offre l’avantage d’avoir groupé les CEF selon certaines catégories (superformance par rapport à SP500, haut dividendes, bonds municipaux ….).

Il est aussi très utile pour comparer graphiquement la performance d’un fond par rapport à son indice le plus proche (notamment le SP500) en intégrant le dividende (on parle de graphiques Total Return : TR) car celui-ci étant important chez les CEF, il doit impérativement être intégré pour comparer l’évolution des cours sous peine de complétement fausser la comparaison.

Il s’agit de https://stockmarketmba.com/fundresearchtools.php